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Le véhicule électrique : entre engouement et inquiétude pour réussir la transition énergétique

Un contexte favorable ?

Avec son programme de soutien aux véhicules électriques et hybrides et son souhait d’accélérer le déploiement de ce nouvel écosystème de mobilité, la France a vocation à devenir l’un des piliers européens de la mobilité électrique.

Selon le rapport final du projet européen « Scénarios pour l’électrification du transport » [1], la part des véhicules électriques et hybrides en France pourrait atteindre, à horizon 2030, 18% du marché automobile dans un scénario réaliste et jusqu’à 26% dans un scénario optimiste. Cette évolution se traduira par environ 4,5 millions de véhicules électriques et hybrides en circulation et 7 millions de points de recharge en 2030.

 

Des signaux tarifaires à mettre en place pour un impact acceptable sur le réseau

Un déploiement de 4,5 millions de véhicules propres représente une consommation électrique supplémentaire d’environ 7 TWh par an, soit environ 2% de notre consommation totale d’électricité actuelle. L’effet de ce déploiement reste alors marginal en termes de consommation électrique mais quel impact pourrait-il avoir sur notre réseau ? Quelles sont les actions à mettre en place pour minimiser les risques de défaillance du réseau et éviter d’accentuer les pics de consommation surtout en périodes de forte demande électrique ?

Le gestionnaire du réseau de transport RTE a simulé les niveaux de consommation journalière en cas d’intégration de la recharge de 4 millions de véhicules électriques au réseau, au travers de trois scénarios qui diffèrent entre eux par la présence ou non de signaux tarifaires incitant les usagers à recharger leurs véhicules aux moments les plus judicieux pour le réseau [2].

On constate que dans les scénarios où les signaux tarifaires sont inexistants ou faibles, la recharge massive de véhicules électriques pèsera fortement sur les périodes de pointe de consommation. Une puissance appelée supplémentaire de 4 000 MW, selon les simulations de RTE, soit l’équivalent de plus de 4 réacteurs nucléaires de 900 MW, pourrait être atteinte. Ceci fait courir un risque de défaillance du réseau électrique en cas de conditions défavorables notamment en hiver, par exemple en période de grand froid et de faible disponibilité du parc nucléaire. A minima, cette recharge massive aurait pour conséquence, dans les scénarios défavorables, l’activation de leviers coûteux et émetteurs de CO2 afin de pouvoir satisfaire cette pointe de consommation (recours plus grand aux énergies fossiles, augmentation des imports d’électricité depuis les pays voisins). En revanche, l’impact des recharges resterait limité si des signaux tarifaires « intelligents » incitaient les usagers à recharger leurs véhicules tout au long de la journée, lissant ainsi le niveau de consommation à la maille nationale.

 

Au-delà des signaux tarifaires, les leviers pour limiter l’impact des véhicules électriques

En parallèle de la mise en place de signaux tarifaires, qui permettent déjà en partie de limiter l’impact des recharges des véhicules électriques, plusieurs leviers sont envisageables : la maîtrise de l’énergie, la gestion optimisée des véhicules électriques entre usagers et le calibrage technique des recharges et des infrastructures.

D’après le dernier bilan prévisionnel de l’équilibre offre-demande publié par RTE [3], les actions de maîtrise de l’énergie feront baisser la consommation française et pourraient permettre au réseau d’absorber une partie de la hausse de consommation due aux recharges de véhicules électriques. De plus, une gestion optimisée des véhicules électriques entre usagers est envisageable, en développant par exemple l’autopartage pour réduire les besoins de recharge à distance parcourue équivalente ou en mettant en place la recharge alternée des véhicules électriques à l’instar de la circulation alternée décidée lors de pic de pollution pour les véhicules actuels. Les modalités de cette gestion optimisée entre usagers nécessiteront des innovations techniques telles que les réseaux électriques intelligents ou « Smart Grids » et des évolutions réglementaires favorisant de telles innovations. Enfin, des mesures ponctuelles pourraient être prises en cas de forte consommation comme la limitation de la puissance de la recharge.

Afin de limiter l’impact de ces recharges de manière pérenne, le calibrage de l’infrastructure de recharge accélérée et rapide semble être indispensable pour réduire le risque d’accentuer les pics de consommation pendant des heures de pointe. Ces recharges pourraient être pilotées localement directement au niveau de la borne, ou par de nouveaux acteurs, comme les agrégateurs de flexibilité, qui en fonction des contraintes réseaux, du prix de l’électricité, du niveau de charge de la batterie et des trajets planifiés par l’utilisateur, construiraient les profils de recharges les plus optimisés pour le système global.

Pour aller même au-delà d’un scénario de recharge contrôlée, il peut être envisagé que les batteries des véhicules électriques communiquent avec le réseau pour répondre à la demande électrique en cas de pic de consommation. Ce concept, appelé « Vehicle to Grid », nécessite des technologies de batteries et d’infrastructures de recharge spécifiquement adaptées à cet usage, technologies encore peu répandues mais qui font l’objet de plusieurs expérimentations en vue d’en évaluer la validité et l’utilité. Au-delà de leur durée de vie, les batteries des véhicules électriques peuvent continuer à rendre service au réseau en ayant une seconde vie dans le stockage stationnaire.

Enfin, il est clair que l’arrivée du véhicule électrique se pose en accélérateur des réflexions relatives aux nouvelles technologies et à l’aménagement du territoire même si de nombreuses inconnues demeurent, dont une des plus grandes est liée à l’usage.

 

À propos de Yélé Consulting

Yélé Consulting est un cabinet de conseil spécialisé dans la transformation numérique et la transition énergétique des territoires et des Utilities. Grâce à notre expertise Smart Grids et Smart Cities, nous accompagnons nos clients, acteurs du secteur de l’énergie et collectivités territoriales, dans leurs programmes d’expérimentations et d’industrialisation Smart Grids, dans la valorisation des données énergétiques à l’échelle d’un territoire, et dans le développement de services urbains innovants et de nouveaux usages intégrés au réseau électrique. Créé en 2010, Yélé compte aujourd’hui près de 60 collaborateurs issus de parcours professionnels au croisement des filières énergétique et numérique. Yélé est membre de l’association professionnelle Think Smartgrids et du pôle de compétitivité Systematic Paris-Region dédié au numérique.