« En quelques secondes, une cyberattaque peut plonger des milliers de foyers dans le noir. » Ce scénario n’a rien de fictif : en Ukraine, une offensive coordonnée a privé plus de 200 000 personnes d’électricité en 2015, et en 2022, le groupe luxembourgeois Encevo a vu ses portails clients d’électricité et de gaz bloqués par un ransomware. Face à la multiplication de ces menaces, la cybersécurité est désormais une priorité stratégique pour les acteurs européens de l’énergie. C’est précisément l’objectif de la directive NIS 2 (Network and Information Security) qui impose un nouveau cadre de règles pour renforcer la résilience des infrastructures critiques.
Adoptée le 14 décembre 2022, et transposée en droit français le 17 octobre 2024, la directive NIS2 fixe désormais des exigences renforcées en matière de sécurité des réseaux et des systèmes d’informations.
Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement pour les entreprises et organisations concernées (nouvelles règles ; échéances…), notamment dans le secteur de l’énergie ?
Un périmètre élargi : de 500 à 10 000 entités en France
La directive NIS 2 élargit considérablement son champ d’application par rapport à la NIS. En effet, alors que cette dernière ciblait uniquement les Opérateurs de Services Essentiels (OSE), NIS 2 introduit deux nouvelles catégories :
- Entités Essentielles (EE)
- Entités Importantes (EI)
L’élargissement des champs d’application entre la directive NIS 1 et NIS 2 explique en grande partie l’augmentation significative du nombre d’organisations concernées. En France, ce nombre passe de 500 à 10 000, et à l’échelle européenne, il atteint désormais 100 000.
Parmi les 18 secteurs critiques couverts par NIS2, le secteur d’énergie occupe une place centrale : électricité, gaz, pétrole, hydrogène, ainsi que réseau de chaleur et froid.
Ces acteurs jouent un rôle central dans la stabilité et la résilience des infrastructures critiques en Europe. Ils doivent désormais répondre à des exigences pour prévenir les cyberattaques et protéger leurs systèmes d’information.
Les dates clés de la mise en conformité
Si la date du 17 octobre 2024 marquait la limite pour la transposition de la directive dans les législations nationales, la situation reste encore en mouvement, notamment en France.
La transposition est portée par le projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, qui intègre NIS 2, DORA et la directive CER. Ce projet a été présenté au Sénat en octobre 2024, mais son adoption définitive n’interviendra probablement pas avant fin 2025 ou début 2026.
Selon l’ANSSI, les entités concernées doivent anticiper une période de transition d’environ trois ans après l’adoption du texte, ce qui repousserait la première échéance réelle de conformité vers fin 2027.
En attendant, l’ANSSI insiste sur la nécessité de ne pas attendre et de démarrer dès maintenant des actions concrètes : audits internes, mise en place de plans de continuité, de détection et de réponse aux incidents.
Quelles sont les nouvelles obligations de NIS 2 ?
La directive NIS 2 impose aux entreprises des mesures renforcées pour garantir la résilience de leurs systèmes critiques :
- Surveillance et gestion des risques : les organisations doivent mettre en place une gouvernance de la cybersécurité, réaliser régulièrement des analyses de risques et appliquer des mesures techniques et organisationnelles adaptées (gestion des accès, segmentation des réseaux, protection des données sensibles).
- Plans de réponse aux incidents : il ne s’agit plus seulement d’avoir une équipe IT prête à intervenir, mais de disposer de véritables plans de continuité et de reprise d’activité (PCA/PRA), testés et mis à jour régulièrement, afin de limiter l’impact d’une cyberattaque sur l’approvisionnement en énergie.
- Obligations de notification : en cas d’incident majeur, l’entreprise doit en informer rapidement les autorités compétentes (en France, l’ANSSI) et, dans certains cas, ses clients et partenaires. Cela implique de mettre en place des procédures internes de détection, d’alerte et de communication claires.
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Quels sont les risques encourus en cas de non-conformité à NIS 2 ?
En cas de non-conformité à NIS2, les sanctions financières sont significativement renforcées. Elles peuvent atteindre jusqu’à 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial, le montant le plus élevé étant retenu. Cela souligne l’importance pour les entreprises de se conformer aux nouvelles règles et de mettre en place dès maintenant les mesures de cybersécurité nécessaires pour protéger leurs systèmes critiques.
NIS 2, une opportunité pour les acteurs de l’énergie
Au-delà des contraintes, la directive NIS 2 représente une opportunité pour les entreprises de l’énergie. En renforçant la sécurité de leurs infrastructures, elles peuvent :
- Prévenir les cyberattaques et protéger leurs clients.
- Accroître la confiance de leurs partenaires et investisseurs.
- Améliorer la résilience globale de leurs activités.
La directive NIS 2 représente un tournant décisif pour la cybersécurité en Europe, imposant des standards plus élevés aux entreprises, notamment dans le secteur de l’énergie. Avec l’élargissement du périmètre à des milliers de nouvelles entités, les organisations doivent renforcer leurs systèmes de sécurité pour se protéger efficacement contre les cybermenaces.
Il est important pour les entreprises de ne pas attendre. Elles doivent dès maintenant, si elles ne l’ont pas encore fait, entamer un audit de leurs infrastructures, identifier les failles potentielles, et mettre en place des plans d’action concrets pour se conformer aux nouvelles exigences. Se préparer à NIS 2, c’est non seulement éviter des sanctions, mais aussi sécuriser l’avenir de leur activité dans un environnement numérique de plus en plus hostile.
Rédacteur : Amine LAADNANI
Sources et liens utiles :