Conviction Yélé #6 Réconcilier les « temps » de l’innovation : les technologies s’adoptent vite, les idées beaucoup moins

Selon nous, le besoin d’axiologie technologique soulevé dans notre Conviction 5 nécessite de prendre en compte trois paradoxes fondamentaux sur la modification du rapport au temps avec l’innovation numérique :

1. Par nos innovations, nous générons de plus en plus de systèmes techniques et numériques complexes qui, chacun et ensemble, génèrent un besoin croissant d’apprentissage, de prise en main et d’expertise. Or, nos ressources humaines et intellectuelles ne sont pas infinies et nous courons le risque de ne pouvoir maintenir et exploiter ces innovations dans le temps, car leur échelle dépasse nos capacités à le faire.
2. Au-delà de la finitude de nos ressources, plus les technologies s’adoptent vite, plus cette accélération prive nos esprits d’analyse, de compréhension, et donc de convergence de nos idées en matière de soutenabilité environnementale et sociale. Les idées mettent souvent beaucoup plus de temps à s’aligner que les technologies à se diffuser, ce qui explique la dissonance que nous pouvons ressentir : la temporalité des avancées technologiques et celles de nos modes de vie ne sont pas les mêmes.
3. Enfin, dans le tropisme général du dépassement de capacité que nous évoquons, la diffusion exponentielle de données et de technologies numériques accroît l’entropie, et invite donc à un « retour à l’essentiel » dans la conception de l’innovation – en comprenant mieux le rôle de l’information. Dans ce monde complexe, comment identifier l’information « objective » à un instant T, ainsi que celle susceptible de conserver une certaine « permanence » ?

Mouvoir nos sociétés vers la soutenabilité environnementale nécessite des transformations comportementales individuelles et collectives. Si nous ne prenons pas le temps de comprendre et adapter nos perceptions et nos subjectivités, l’accélération liée aux technologies risque de nous éloigner de cette quête de viabilité écologique et sociétale : il nous faut faire entrer nos innovations en « résonance » avec ces objectifs.

En somme, nous devons comprendre ce qui peut créer ou entretenir notre « immunité au changement ». Nous sommes convaincus qu’au travers de ces paradoxes nous pouvons identifier une voie de l’équilibre qui maximise performance, valeur et soutenabilité environnementale – notamment via l’adoption de programmes d’innovation performants en accord avec la transformation de notre société et de nos entreprises. 

Auteurs : Océane WRIGHT et Guiv-Roger MORIN

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